Livres Anciens Bibliothèque BAPSO 2010 Saint-OmerLivres Anciens de la Bibliothèque d'Agglomération du Pays de Saint-Omer
©Livres Anciens de la Bibliothèque d'Agglomération du Pays de Saint-Omer|Photo Carl - Tourisme en Pays de Saint-Omer

Un First Folio de Shakespeare à Saint-Omer

C’est ce genre d’histoire qui n’arrive qu’ici… L’histoire d’un trésor caché dans une bibliothèque et oublié de tous jusqu’à un pur hasard et un inventaire qui permettra de révéler un manuscrit rarissime: un « First Folio » de 1623 issu des œuvres de Shakespeare.

En 2014, Rémy Cordonnier, responsable de fonds patrimoniaux à la BAPSO (Bibliothèque d’Agglomération du Pays de Saint-Omer), passe en revue des volumes dans le cadre de la préparation d’une exposition sur la littérature anglaise quand il s’arrête sur un manuscrit de Shakespeare répertorié comme datant du XVIIIe siècle. Rapidement, la mise en page, la langue utilisée, la patine du cuir lui donne le sentiment d’une édition plus ancienne.

Il pense même que le manuscrit pourrait être un First Folio, une première édition. Ici, la première compilation des œuvres théâtrales de Shakespeare, datant de 1623, soit sept ans après sa mort. Il devait exister environ 800 volumes de cette parution, dont 232 seulement sont encore conservés dans le monde. Heureux hasard, Éric Rasmussen, grand spécialiste de Shakespeare à l’université de Reno dans le Nevada, était en visite à Londres pour préparer les cinq cents ans de la mort de l’auteur. Enchanté de la découverte, il a effectué l’aller-retour presque immédiatement après avoir été contacté. Quelques minutes d’analyse de l’ouvrage ont suffi à le convaincre : il s’agit bien d’un first folio. Voici donc le 233e exemplaire dans le monde et le 2e en France (l’autre se trouvant à la Bibliothèque nationale de France).

Être ou ne pas être : il y était pourtant depuis 400 ans

Il est relativement facile d’imaginer que ce First Folio ait été acheminé par un Anglais catholique fuyant les persécutions des protestants en Angleterre. L’exemplaire est en « bon état », mais il manque toutefois une trentaine de pages, dont celle de titre, ce qui explique qu’il ait pu rester pendant quatre siècles dans l’oubli. Sur la première page de l’ouvrage y figure le nom de Neville dont il pourrait s’agir du pseudonyme d’un certain Edward Scarisbrick, membre d’une grande famille catholique anglaise, qui se serait réfugié chez les Jésuites de Saint-Omer en 1650 selon le spécialiste shakespearien Eric Rasmussen. Une théorie parmi bien d’autres et dont le mystère reste entier.

Des annotations, des rectifications et remarques manuscrites complètent l’œuvre et permettent d’ajouter de la vie à cet ouvrage unique.

Ce First Folio va aussi rejoindre une impressionnante collection de 800 manuscrits et 230 incunables (ouvrages imprimés en Occident avant 1501), ainsi qu’une véritable bible de Gutenberg. Tous ces ouvrages font l’objet d’expositions assez récurrentes dans cette jolie bibliothèque et cette salle d’archives dignes d’un décor de cinéma.

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